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...LE RESTE...
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6 juillet 2006

Just this time

La voix aigue de Klaus Nomi me fait penser à cet été en Californie, à la nuit dans San Francisco, à la radio dans la voiture louée et ce bruit qui prenait les autres bruits en otage, ce bruit de ta respiration quand tu t'arrêtais de parler.

Les mains sur le cuir du volant, tu me montrais d’un coup de menton à droite le grand immeuble du FBI dont l'ombre brillante glissait alors sur le pare-brise et semblait entrer à l’intérieur de l’habitacle.

Tu prenais chaque soir la sortie en direction de l’autoroute. Sur la highway les voitures filaient, elles nous dépassaient.  On roulait, on ne faisait que rouler, et la seule chose qu’il me restait pour m’occuper c'était d’écouter une chanson en boucle dans mon walkman et de regarder les rubans luminescents des automobiles qui défilaient sur l'asphalte chaud et d’ouvrir ma fenêtre et de sentir l'air lourd et de me tenir penché en avant avec la vague envie de vomir et sentir alors ta main sur mon épaule et ta voix enfin qui dit: ça va?


Quand les télés s'allumaient dans les motels, les histoires du monde continuaient encore, et nous étions allongés sur un lit et je te demandais de me parler, et tu prenais la télécommande et tu éteignais, tu te retournais, tu te taisais, et j'ouvrais un journal, et je me taisais aussi. Un temps passait. C’était le son du ventilateur qui me réveillait. Tu dormais. Sur le plafond je voyais les lignes qui ressemblaient à d'autres lignes, et au loin on devinait les aboiements de chiens et le crissement des freins d'une voiture. Je me demandais ce qu’on pouvait bien foutre ici toi et moi, un peu enfermés, un peu trop silencieux dans ce pays.

Chaque jour tu regardais ton passeport qui n'est pas le même que le mien. Chaque jour tu crachais du sang sous la douche. Chaque jour tu perdais un peu plus ta voix. Un jour tu ne parlerais plus. Ils pourraient t’arrêter, tu n’aurais rien à dire, plus rien à dire.

On ne fuyait pas. Tu n’aimais pas que je pense à cela. Tu me disais : c’est une promenade.

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Commentaires
L
Un joli texte mon Nuage, un texte qui laisse l'esprit libre d'imaginer... Je suis contente d'avoir de nouveau quelque chose de toi à lire ici... Bises
...LE RESTE...
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